LES MARTYRS DU FORT DE PENTHIEVRE

Hello tout le monde,

Aujourd’hui, direction le fort de Penthièvre, (56510), à Saint-Pierre-Quiberon dans le département du Morbihan en Bretagne.

Le fort de Penthièvre construit tout en calcaire se dresse fièrement à l’entrée même de la Presqu’île. Sa construction à débutée en 1747 à la suite du siège de Lorient et du pillage de la presqu’île de Quiberon en 1746, dans le cadre de renforcement des défenses du littoral sud de Bretagne et grâce au financement du Duc de Penthièvre.

Témoin de l’histoire, l’ouvrage fortifié fut disputé par les Chouans et les Républicains en 1795, il servi de prison lors de la Première Guerre Mondiale afin d’y interner les prisonniers Allemands, puis sera la scène de l’exécution de 59 résistants pendant la seconde guerre mondiale, (sujet que je vais abordé aujourd’hui dans cet article). De nos jours il est utilisé comme base d’entraînement militaire et seuls les espaces extérieurs sont accessibles.


Retour dans les années 40 :

Durant la Seconde Guerre Mondiale, les forces allemandes intègrent cet édifice au dispositif de défense du Mur de l’Atlantique.

Jusqu’en avril 1944, le Fort de Penthièvre est utilisé comme prison où sont incarcérés des soldats de la Wehrmacht frappés de sanctions disciplinaires. Le 27 avril 1944, dans le cadre de la « lutte contre les terroristes », le général Fahrmbacher commandant le XXVe Corps d’Armée en Bretagne, donne l’ordre d’« installer des centres de rassemblement » dans les citadelles de Brest et de Port-Louis mais aussi au fort de Penthièvre, « où devront être logés les terroristes arrêtés au cours des interventions de la troupe, en accord avec le SD, et ce jusqu’à leur jugement ou leur évacuation ». La garde de des lieux de détention, où siègent les tribunaux militaires allemands spéciaux, est alors confiée à un régiment de la forteresse.


De mai 1944 à mai 1945, dans le fort, une salle de torture est aménagée, où les détenus y subissent les sévices du lieutenant SS Sülling : la pendaison par les pieds, les coups de bâton, le supplice de la baignoire et l’arrachage des ongles y sont alors des « exercices » quotidiens. Cet officier géorgien, appartenant à une « unité de l’Est » formée de volontaires armés par la Wehrmacht, sera accusé en 1945 d’avoir assassiné cinq détenus dont deux brûlés vifs après avoir été arrosés d’essence.

(Selon l’enquête réalisée en mai 1945 à la demande du Comité international de la Croix-Rouge par le lieutenant Cauchy, le tribunal militaire spécial du Fort-Penthièvre a prononcé huit condamnations à mort pour détention d’armes interdites et actes de francs-tireurs, au cours des audiences des 18 et 19 mai 1944, qui ont été exécutées les 19 et 23 mai 1944. Ces exécutions ont fait l’objet d’un « Avis » publié dans Le Nouvelliste du Morbihan du 17 juin 1944).

Fin juin 1944, 23 détenus du fort de Penthièvre sont transférés à la citadelle de Port-Louis, où une vingtaine d’entre eux sont fusillés après le 1er juillet 1944, en exécution d’un jugement rendu par la Kommandantur de Vannes.
Le 11 juillet 1944, devant l’avancée des troupes américaines, le chef de la Gestapo de Vannes, donne l’ordre au colonel Reese, officier de la Wehrmacht, d’exécuter 52 détenus de la prison surpeuplée de Vannes. Le major Esser, chef de bataillon de la défense côtière, chargé d’exécuter cet ordre, fait transférer cinquante détenus, pour la plupart des résistants appartenant aux Forces françaises de l’intérieur (FFI) et aux Francs-tireurs et partisans français (FTPF) de la prison de Vannes jusqu’au Fort de Penthièvre, où ils sont assassinés le 13 juillet 1944, l’exécution va durer trois heures.

Les détenus de la prison de Vannes, parmi lesquels se trouvaient vingt-cinq résistants de la commune de Locminé sont emmenés deux par deux devant les pelotons d’exécution composés de SS géorgiens placés sous le commandement du lieutenant Wassilenko.
Les corps des résistants exécutés sans jugement, dont certains agonisent encore, sont jetés dans une galerie souterraine d’une trentaine de mètres creusée à cet effet à partir d’un tunnel préexistant de quelques mètres. La galerie est ensuite refermée par trois murs distants de trois mètres les uns des autres et séparés par de la terre.

Voici le récit d’un prêtre catholique allemand, Andréas Weiglen: «J’allais ensuite à la place d’exécution sur les murs de la citadelle. Là il y avait deux bouts de bois dans la terre environ cinq mètres plus loin je voyais sept soldats allemands avec leurs fusils… A côté́ se trouvaient un médecin allemand et un juge de guerre de la division de Redon. Comme premier on amenait Léon Fallot et on ficelait son dos contre le bois. Le juge lisait la condamnation en allemand et après en français. La cause était nommée « franc-tireur ». Sur la question du juge : « Avez-vous encore un désir ? » Fallot répond : « Rien ». J’allais vers lui et priais avec lui « Mon Jésus ayez pitié́ de nous»… Pendant que je me retirais et que les soldats tournaient le levier de sûreté, Fallot s’écria « Vive la France ! ». Sur ordre les soldats firent feu et Fallot tomba. Il a été́ détaché et déficelé. On l’a posé sur l’herbe, et après quelques instants le médecin constatait sa mort. On porta le corps du mort à côté́. Où ? Je ne sais pas. A ma demande « Qui fera l’enterrement ? » On me répondit: « Le curé de Saint-Pierre ». La même chose se répéta encore cinq fois. En deuxième et troisième ce furent les frères Samson. Je ne me rappelle plus la suite des trois autres. Ils venaient tous sans indice de peur, très courageux, comme des héros, comme des hommes qui combattent pour une grande idée. Les officiers et soldats qui étaient présents avaient aussi la même impression. Je quittai la place de l’exécution et même le soleil levant qui annonçait une belle journée d’été́ de juillet ne pouvait pas me consoler, et je me demandais: « Pourquoi ces six hommes là devaient-ils mourir ? ».
Il n’y eut pas d’enterrement fait par le curé de Saint Pierre: les corps furent jetés dans une sorte de boyau souterrain d’une trentaine de mètres, creusé par les Allemands à partir d’un tunnel qui était primitivement profond de quelques mètres, tunnel qu’ils refermaient sur les cadavres par trois épaisseurs de murs, distants de trois mètres les uns des autres et séparés par de la terre. Au moment de la découverte des corps, on relèvera sur les murs des inscriptions « Vive de Gaulle » et des croix de Lorraine entourées de « V », ce qui peut laisser craindre que tous ne fussent pas morts lors de la fermeture du tunnel…

Le 16 mai 1945, neuf jours après la reddition de la Poche de Lorient, cinquante cadavres en état de décomposition avancée sont exhumés par des prisonniers de guerre allemands en présence du docteur Dorso, médecin légiste, et du médecin capitaine Wolfrom. Les corps entassés les mains liées par des fils de fer dans le dos ou sur la tête.

Sur une plaque de marbre blanc apposée à l’entrée de la galerie où fut découvert le charnier, sont gravés les noms, prénoms, âges de ces cinquante patriotes classés par commune d’origine.

Ainsi que la phrase :  » À la mémoire des cinquante patriotes des Forces françaises de l’intérieur martyrisés et lâchement assassinés par les Allemands le 13 juillet 1944 et découverts dans cette fosse le 16 mai 1945 « .

Le 11 juillet 1948, un monument est inauguré devant le fort de Penthièvre, constitué d’un obélisque en pierres de granit et surmonté d’une Croix de Lorraine. Au pied de cet obélisque sont posées trois dalles.


Chaque année, le 13 juillet, une cérémonie commémorative se déroule au pied du monument et une messe est célébrée dans les douves du fort près de la galerie où les corps des résistants exécutés ont été retrouvés.

Voilà l’histoire cruelle qui marqua le fort de Penthièvre et toute la population après guerre. Si jamais vous passez dans le secteur, je vous invite à venir voir le lieu, certes, vous ne pourrez visiter la forteresse, mais vous avez accès à l’obélisque, et le souterrain avec les plaques d’information. C’est un lieu de recueillement et le souterrain est chargé d’émotions. Pas de soucis pour se garer à proximité, pas de tenue particulière mais pour les filles éviter les talons. Pour les enfants, à partir de 8 ans c’est tout à fait possible sous la responsabilité d’un adulte, (nous sommes sur un terrain militaire). Pour les personnes à mobilité réduite, vous pouvez accéder à l’obélisque mais pas au souterrain car il faut descendre un escalier métallique assez raide. Enfin petit point pour le souterrain, attention aux personnes claustrophobes qui pourraient être gênées.

INTÉRÊT HISTORIQUE :

Note : 5 sur 5.


ACCESSIBILITÉ :

Note : 3.5 sur 5.


ENFANT :

Note : 3 sur 5.

(Photos collection privée Patricia Gontier)

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